Dès la publication de la convention tripartite en 2012, le SNU Pôle Emploi FSU a alerté sur la situation de Pôle emploi et sur ses stratégies d’économies draconiennes qui conduisent inéluctablement à la situation actuelle de dégradation des services publics de l’emploi, du service rendu aux usagers, demandeurs d’emploi comme entreprises, et des conditions de travail des agents.
En 2011, les élus au Comité d’Etablissement de Pôle emploi Bretagne ont demandé une expertise des comptes de la Direction Régionale Bretonne afin de vérifier si les ambitions de Pôle emploi étaient en adéquation avec nos moyens régionaux.
Le 30 août dernier, l’APEX nous a présenté les résultats de son travail.
Les conclusions sont sans appel ! NON, Pôle emploi n’a pas les moyens de ses ambitions. Ce n’est évidemment un scoop pour personne… Cependant, ce rapport permet de mettre en lumière les stratégies organisationnelles nationales qui visent à faire + avec – et non pas + pour ceux qui en auraient le + besoin !
Le rapport met notamment en évidence le désengagement de l’Etat dans la prise en charge du chômage : « Ce décrochage entre les moyens de l’Institution et la charge de travail, résulte en grande partie d’une insuffisance de financements. En effet, alors que la crise perdurait, les ressources de Pôle emploi diminuaient notamment sous l’effet d’une baisse de la contribution Unedic (baisse des produits provenant des cotisations sociales liées à la contraction de l’emploi).
L’Etat, 2ème financeur en masse, n’a pas non plus accompagné Pôle emploi dans ses besoins en effectifs pour faire face aux flux de nouveaux DE, la subvention restant inchangée sur la période 2009-2011. »
Et tout ceci se fait au moment de la mise en application de la nouvelle convention collective…particulièrement coûteuse, tant du point de vue de la masse des « optants » que du point de vue du nouveau schéma d’implantation territoriale.
Alors… ??? : « des politiques d’économies de dépenses et la recherche de gains de productivité ont été engagées. »…
Le « goulet d’étranglement principal » identifié par l’expert est évidemment l’offre de service entreprise. Et oui, nous nous en doutions tous ! Et bien maintenant, il est ici clairement établi et mis en lumière que depuis plusieurs années le parent pauvre de Pôle emploi est bien la Relation Entreprise. Pour preuve, qui peut encore se vanter de faire de la RE ???
Mais 2009-2011 ce n’était qu’un début. Avec Pôle emploi 2015, les choses risquent de se dégrader encore d’avantage. La nouvelle offre de service entreprise met le conseiller à distance des employeurs et bientôt des offres par le biais du chantier « transparence du marché du travail ». Très prochainement les Jobs Boards envahiront Pôle-emploi.fr et une nouvelle étape vers un service public 100% web sera franchie.
Le rapport d’expertise démontre également ce que la direction refuse d’admettre : « les contacts entreprises, en particulier les visites, ont été repoussées et leur volume réduit a conduit à des performances dégradées en matière d’intermédiation, en particulier sur la part de marché et les mises en relation positives. » Pour le SNU renoncer à l’Entreprise, c’est amputer les conseillers d’un outil majeur de l’intermédiation !
Mais l’entreprise n’a pas été le seul sacrifice dans cette recherche d’efficience économique. « La baisse sensible des budgets de prestations d’intervenants externes, en particulier opérateurs privés de placement, répond également à cet objectif de réduction des dépenses ». Alors même si le SNU est favorable à une réintégration de ces accompagnements par Pôle emploi lui-même, peut-on se réjouir de voir qu’après l’alourdissement des portefeuilles de DE, la réduction du travail auprès des entreprises, l’accompagnement des DE est lui aussi allégé pour répondre à la politique d’économie des dépenses de l’Institution ?
L’Etat pour sa part communiquera sur les moyens supplémentaires alloués début 2013. Le rapport en parle en ces termes : « la décision de l’Etat de créer 2000 postes début 2013 (4% de l’effectif), bien que bienvenue ne suffira probablement pas à alléger significativement la surcharge de travail des agents. En effet, 1800 postes avaient été supprimés en 2011 ».
Depuis 2000 postes supplémentaires ont été créés. Ils arrivent au moment où les 1000 CDD Sarkozy prennent fin… restent 1000. Mais rappelons-nous que sur ces 2000 postes, 700 d’entre eux sont financés par Pôle emploi lui-même, sur ces fameuses économies de dépenses. En bref, bénéfice net 300 postes qui ne compensent en rien la montée en charge des portefeuilles de DE encore cette année.
Mais alors comment trouver encore plus de sources d’économies ? Pour répondre à cette question l’Etablissement a fait appel aux conseils de Cap Gemini qui vend des recettes miracles.
D’abord, toutes les agences de Bretagne participeront au chantier « Simplification des actes métiers ». Il s’agira, par des techniques de Lean Management, de chasser les irritants pour récupérer 1,5 ETP par agence. Ces fameux ETP qui financeront les 700 postes promis par l’Etat. Rappelons tout de même que le Lean Management est aujourd’hui reconnu par nombreux ergonomes comme plus nocif que le Taylorisme lui-même. Rappelons également que Cap Gemini a refusé de s’appliquer à lui-même les principes de Lean Management, cela ne laisse-t-il pas songeur ???
Ajoutez donc à cette simplification des actes métiers à l’accueil un pilotage de l’accueil par les flux. Vous savez, cette bonne vieille méthode des flux tendus utilisée par les toyotistes…
Ajoutez-y encore un peu de Benchmarking histoire de mettre les agences sous pression et en concurrence et mesurez enfin les économies d’échelles réalisées sur le dos des agents, au profit des économies de dépenses et au détriment de la qualité du service rendu…
Voici donc la recette de l’établissement pour réaliser les économies de dépenses attendues. Recette corroborée par le rapport APEX sur l’expertise des comptes 2011 de Pôle emploi Bretagne.
Nos conditions de travail et la qualité du service rendu sont clairement dégradées au regard de cette politique irresponsable que nous dénonçons. Indignons-nous, nous sommes tous concernés.
La prochaine étape risque de concerner le régime Assurance Chômage lui-même. En effet, l’Unedic publie dans un rapport sur sa situation financière en mai 2013 : « La variation de trésorerie de l’Assurance chômage pourrait présenter un déficit de 4,8 Milliards d’euros en 2013 et de 5,6 Milliards d’euros en 2014. La situation financière de l’Assurance chômage serait alors de ‐18,5 Milliards d’euros à fin 2013 Et de ‐24,1 Milliards d’euros à fin 2014. »
Compte tenu du mode de financement de Pôle emploi, de sa stratégie d’économies de dépenses encore en vigueur, de ses stratégies organisationnelles inscrites dans Pôle emploi 2015, ces chiffres ne peuvent que nous alerter encore une fois, tant sur la situation des demandeurs d’emploi indemnisés ou non que sur la situation des métiers de l’indemnisation. Inscrite dans Pôle emploi 2015, la simplification du calcul du droit est d’actualité.
Défendre nos métiers c’est aussi défendre un Service Public de l’Emploi digne de ce nom !
Le SNU revendique un Service Public de l’Emploi de qualité, un revenu de remplacement digne pour les personnes privées d’emploi et des conditions de travail décentes pour les agents de Pôle emploi !
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